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克里斯·马克记录/发明日本:异国 Le Dépays

Le texte ne commente plus les images que les images n’illustrent le texte.
文本并不比图片更能评论图片,图片也不比文本更能描画文本

CHRIS MARKER
《Le Dépays》是一本由克里斯·马克(Chris Marker)创作的关于日本的照片和文字作品。这本书如今已经很难找到。

中译按

在1983年电影《日月无光》(Sans Soleil)上映前的几个月,克里斯·马克出版了《异国》(Le Dépays),这本书可以被视为《日月无光》的前传。通过三篇短文和大量照片,马克呈现了他对日本记忆的另一次旅程,从更多视角揭示了电影的主题。

在《异国》的开头,马克就告诫读者:“文本并不比图像更能评论图像,图像也不比文本更能描画文本。它们是两个明显相互交叉并向彼此发出信号的序列,但将它们对照起来毫无意义。”在这里,马克也在与读者乃至电影观众玩一种矛盾的游戏,在有明示或暗示的图文关系中,警告你二者并无必然的联系。聪明的读者或观众会明白,重要的不是它们是否有必然联系,而是这种永恒的矛盾,是其中的张力,是你在永恒的不确定性中嬉戏。

在《异国》中,马克反思和喜爱的是日本所代表的东方精神,是辩证法的魅力。如他所说,在这个国家,“没有人会去解开纠缠在一起的自行车”。这里不是如西方式的非此即彼,而是永恒地处于和谐的矛盾辩证法之中。在这里,物质与精神,暴力与礼貌,猫与人,生与死,好像并非处于对立面,反而是一种嵌套关系,或可以称之为道家所说的“玄”。如此一来,日本也与非日本辩证统一,真正的日本或许藏在另一个日本中,也就是马克所发明的日本。而一个人真正的祖国与故乡,实际上在异国他乡。

马克带着相机漫步东京,探索日本,或者用他的话说,是在这个过程中发明日本。为了接近并理解日本文化,猫是他最重要的主题,在他的文本和照片中都有体现。

在他的旅程中,马克遇到了著名的招财猫(Maneki-Neko)和鲜为人知的妖化猫(Bake-Neko)。在《异国》的开头,马克就告诉读者:“文本并不比图片更能评论图片,图片也不比文本更能描画文本。它们是两个明显相互交叉并向彼此发出信号的序列,但将它们对照起来毫无意义。”

这本非常稀有的《异国》第一版由克里斯·马克亲笔签名,他在签名中提到了化猫:“给伊迪斯(Edith)——如果我见过化猫,那就是这个。”

马克对化猫情有独钟,化猫是日本民间传说中的一种神秘生物,通常被描述为具有超自然能力的猫。根据日本民间信仰,猫年纪越大,越有可能变成化猫。这种生物具有变形的能力,尤其是变成人类的能力,通常是为了诡计或复仇。

在日本的民间故事和文学作品中,化猫通常被描绘成狡猾且有时恶毒的角色。然而,在某些故事中,它们也可能是忠诚和善良的守护者。化猫的形象在日本的艺术和文化中一直很受欢迎,成为了许多电影、动画和漫画作品的灵感来源。化猫还属于日本双胞胎神话传说的传统,其中猫变成了女人。过程总是相同的:一个人被杀,一只目睹谋杀的猫将其精神传递到一个女人的身体上。这神话的任何版本里,都有一个时刻,女人开始将她的行为与猫的行为混合在一起,最后这个女人成为复仇的工具。

沙皮狗


《异国》

Herscher Format-photo, 1982
collection FORMAT / photo
© 1982 Éditions Herscher, Paris
中译:LuegFangz
校对:沙皮狗&Guangni

Avertissement au lecteur
告诫读者

Le texte ne commente pas plus les images que les images n’illustrent le texte. Ce sont deux séries de séquences à qui il arrive bien évidemment de se croiser et de se faire signe, mais qu’il serait inutilement fatigant d’essayer de confronter. Qu’on veuille donc bien les prendre dans le désordre, la simplicité et le dédoublement, comme il convient de prendre toute chose au Japon.

文本并不比图片更能评论图片,图片也不比文本更能描画文本。它们是两个明显相互交叉并向彼此发出信号的序列,但以它们相互对照则是白费力气。因此,我们应该以无序的、单一的和二分的方式去把握它们,就像我们把握日本所有事情的那种方式一样。

1

Insomnie de l’aube à Tokyo. Les voix des corbeaux porteurs de dépêches qui s’annoncent à tous les octrois commencent de se perdre dans les bruits de la ville. Aux gares terminales se mettent en marche les trains de couleur — vert Yamanote, bleu Tozai, rouge laque Marunouchi, nom et couleur à jamais inséparables — qui vont emplir la matinée d’une rumeur grandissante de bowling, dominée par l’impériale corne de brume du Shinkansen. La neige du téléviseur encore allumée va bientôt s’effacer devant la première mire, mais en ce moment il ressemble plutôt à une de ces lanternes blanches et carrées qu’on voit à la télévision, justement, dans les histoires de samourais et de fantômes. C’est ce qu’on appelle une mise en abîme. La Dame des actualités du matin apparaît sur l’écran, ou la première pub, ou Doraemon le chat-robot. Tiens, se dit-on, une autre journée est passée. Comme si c’était seulement au réveil, en se retournant sur elle, qu’on pouvait prendre les vraies mesures de cette journée vécue hors du temps, , d’immobilité au centre du manège, dans un goût d’éternité que nous appellerons Japon comme d’autres l’appellent Hollande. Ici, le Temps est une rivière qui ne coule que la nuit.

东京破晓时的失眠。乌鸦焦躁的声音向所有的商户宣示着自己,现在则开始消失在城市的噪声中。在终点站,不同色彩的列车已经蓄势待发——绿色的山手线、蓝色的东西线、漆红的丸之内线,名字和颜色永不可分。在新干线肃穆的汽笛声的主导下,它们逐渐让保龄球馆般的喧哗占据东京的清晨。已经打开的电视上的雪花噪点,很快就会在第一个测试图像出现前褪去,但此刻,它看起来更像是你会在电视上看到的其中一种方形白灯笼,总是出现在武士或者妖怪的故事里。这就是所谓的“嵌套”(mise en abîme)。主持早间新闻的女士浮现在屏幕上,也有可能是第一支广告,也有可能是机器猫哆啦A梦。瞧,你想,又一天过去了。仿佛只有当我们醒来的时候,回顾这一天,我们才能真正衡量这在时间之外被度过的一天,在旋转木马静止的中心柱,在这对永恒的一瞥中:我们称之为日本,正如其他人称之为荷兰。在这里,时间是一条只在夜间流淌的河。

Inventer le Japon est un moyen comme un autre de le connaître. Une fois dépassées les idées reçues, une fois contournée l’idée reçue de prendre le contre-pied des idées reçues, mathématiquement les chances sont les mêmes pour tous, et que de temps gagné. Se fier aux apparences, confondre sciemment le décor avec la pièce, ne jamais s’inquiéter de comprendre, être là — dasein — et tout vous sera donné par surcroît. Enfin, un peu.

发明日本只是了解它的其中一种方式。一旦你克服了所有既有的成见,一旦你同时绕开了对所有既有成见的驳斥,从数学上来看,每个人都有着同样的机会,并且多么省时!相信表象,故意混淆戏台布景与正在演出的戏剧,永远不要担心理解,只需“在此”——此在(dasein)——一切都会附赠于你。嗯,就是这样。

“We Japanese have a very special relationship with cats.” C’est Toru Takemitsu qui t’a dit ça hier soir, dans un petit bar de Shinjuku. Venant d’un des plus grands musiciens vivants, la confidence est précieuse. Derrière lui, rangées côte à côte, les bouteilles de whisky des habitués du bar sont rondes et lisses comme des tortues. Et l’association de ces deux mots, chat et whisky, t’a fait passer dans la tête, comme une névralgie, le regard d’un chat qui s’appelait précisément Whisky — nom assez improbable pour un chat du douzième arrondissement, mais c’était ainsi. Et il suffisait que du premier étage tu l’appelles, sans même forcer la voix : “Whisky” pour qu’il lève sur toi ce regard — et bien oui, inoubliable… Quelques microsecondes plus tard il était là, sur le balcon, par une de ces compressions de l’espace-temps que les chats sont seuls à connaître, avec quelques ascètes tibétains. Le chat Whisky est mort écrasé par un camion et tu lèves ton verre à sa mémoire, à la mémoire de ton autre ami-chat bleu russe, bleu Tozai, à la mémoire de la chouette effraie qui est morte un jour sur ta main, étouffée par la boule qu’elle avalait avec une hâte de chasseresse. Tu te demandais quelquefois comment ils voyaient les hommes, ces animaux. Pour les chats, il n’était pas si sûr que leur humain représente une personne unique : plutôt une espèce de troupeau, dont ils venaient vérifier avec curiosité s’il se présentait toujours dans le même ordre, vertical ou horizontal, ici la tête, ici les pieds. Pour la chouette, nous étions peut-être de grands ombres indistinctes, pas hostiles, mais indéchiffrables. Pendant qu’elle luttait pour retrouver le souffle, pendant que pour la première fois le vertige de la mort entrait dans sa tête de chouette, ses yeux disaient: “ombre tu me tues, ombre, tu m’abandonnes” et sa dernière convulsion a refermé sur ton doigt un nœud de serres aiguës, fatales aux rongeurs. Ton doigt est resté bleu pendant des semaines, bleu comme le chat russe, comme la Tozai Line, et longtemps tu as porté sur toi ce signe, lent à s’effacer, comme un remords.

“我们日本人与猫有一种非常特殊的关系。”昨晚,在新宿的一个小酒吧里,武满彻这样告诉你。从在世最伟大的音乐家之一的口中说出,这种交心自是很珍贵的。在他身后,酒吧常客的威士忌瓶一字排开,圆滑如同乌龟。而猫和威士忌这两个词的联想,使得一只恰好叫做“威士忌”的猫的模样,像神经痛一样在你脑海中闪过——对于一只来自巴黎十二区的猫来说,这是一个相当不寻常的名字,但它就是这样的。你只需要在二楼呼唤它,甚至不用抬高自己的音量:“威士忌!”它就会抬头看你——确实如此,令人难忘……几微秒后,它就在那里了,在阳台上,通过那种——只有猫和两三位西藏苦行僧才知晓的——能够压缩时空的神通。猫咪“威士忌”死了,它被一辆卡车碾过,你举杯纪念它,纪念你的另一只猫咪朋友,一只俄罗斯蓝猫、蓝色的东西线,纪念有一天死在你手上的谷仓猫头鹰,它在像一位女猎人那样匆忙地吞咽下一个小球的时候呛死了。你有时会想,这些动物是如何看待人的。对猫来说,它们不确定它们的人类是否代表一个独特的个人:而是一群。它们好奇地来检查人是否总是以同样的秩序出现,垂直或水平,这是头,这是脚。对猫头鹰来说,我们也许是巨大的、模糊的影子,没有敌意,但无法辨别。当她挣扎着试图喘上气时,当死亡的眩晕第一次进入她小小的猫头鹰脑袋时,她的眼睛说:“影子,你杀死了我;影子,你抛弃了我”,她最后的抽搐在你的手指上系上了一个结,利爪之结,这对啮齿动物而言是致命的。你的手指几个周之内都留着这蓝色,俄罗斯蓝猫一样的蓝色,东西线一样的蓝色,在很长一段时间里,你带着这个标志,它慢慢褪去,如悔恨一样。

D’autres ce soir boivent peut-être à la mort des rois, à la mort des empires. Nous, à Shinjuku, buvons à la mort des chats et des chouettes. Quoi de plus naturel ? A un quart d’heure de marche, et sans sortir de Shinjuku, nous trouverons le temple de Ji Cho In, à Nishi Ochiai, où l’on prie pour les chats du monde entier. Un superbe maniki neko, le chat-qui-te-salue, mascotte des commerçants avisés et des prostituées attentives, veille à la porte du sanctuaire. Le bonze dévoile pour quelque obole les statues de chats offertes — au XVIè siècle par un chef de guerre dont la route avait été coupée par un chat noir (et qui, au lieu d’y voir un mauvais présage comme n’importe quel Européen borné, suivit le chat et fut guidé vers une position stratégique qui lui fit remporter la victoire) — au XVIIè siècle par un marchand dont le chat, du seul éclat de sa présence qui attirait les clients, fit la fortune — et au XVIIIè siècle par une Belle Dame dont, jusqu’à ce jour, tu n’as pas compris si elle avait un chat, si elle était un chat, ni ce qu’elle venait faire dans l’histoire. Mais tu as appris à ne pas poser de questions. Ce que dit le conte est vrai de ce que le conte dit que ce que dit le conte est vrai, comme conterait la Demoiselle du carrefour de tes voyages.

这晚,其他人可能在为国王的死亡、帝国的死亡而举杯怀念。我们,在新宿,则为猫和猫头鹰的死亡举杯。还有什么能比这更自然的呢?无须离开新宿,从这儿步行十五分钟的距离,我们会看到位于西落合的自性院,在那儿人们为全世界的猫儿祈祷。一只漂亮的招财猫(maneki neko),也就是那永远向你打招呼的猫,是精明的店主和殷勤的妓女的吉祥物,看守着寺门。以几个铜板的香火钱的价格,僧侣为我们揭开了捐献这些猫像的人的面纱——其一是16世纪时的一位大名。他的行路被一只黑猫阻断(他没有像任何一位心胸狭窄的欧洲人那样把这看作是一个坏兆头,而是跟着猫走;猫则引导他到一个战略要地去,这为他赢得了胜利)——其二是17世纪时的一位商人。他的猫动人可爱,单藉此便吸引来许多顾客,发了大财——其三则是18世纪的一位美丽的女士,直到今天,你还不明白她是否有一只猫,她是否是一只猫,或者她在这个故事里扮演了什么角色。但你已经学会了不去问问题。故事里说的都是真的,因为故事里已经说了:故事里说的都是真的。正如在你旅途中的十字路口的那位少女会告诉你的那样。

Quand tu es revenu pour la première fois en Europe avec tes histoires de chats japonais, tes amis y ont vu la preuve qu’un maniaque trouve toujours de quoi alimenter sa manie. Il a fallu leur montrer les images de Ji Cho In, du cimetière des chats à Go To Ku Ji, avec ses douzaines de Maniki neko étagés, leur prouver que, dans le bloc1-16-1 de Ginza Chuo-ku, les enfants ont dessiné une marelle à chats, et qu’un vrai chaton est venu y faire sa sieste, leur jurer qu’une chatte avait laissé ses initiales dans le béton de Shimbashi. C’est tout de même en ouvrant devant eux le livre publié en 1980 par Keibunsha, et qui fait le recensement méthodique, plans à l’appui, de tous les lieux de Tokyo connectés au Chat, que tu les a sentis un peu ébranlés. Voir imprimé sur papier glacé, avec des précautions de géographe, le plus sûr moyen de trouver le restaurant d’Iriya où l’on peut dîner parmi des chats en liberté, ça impressionne. Alors tu as pu leur raconter mieux les autres rencontres, celle des jumelles dans le train qui te menait à Go To Ku Ji, justement (il pleuvait comme dans Rashomon, tu ne savais pas encore où était le temple, tu arrêtais les passants en disant “neko” et en joignant les mains dans le geste de l’oraison bouddhiste : ils comprenaient tous, mais tous ne savaient pas, il t’a fallu une heure et plusieurs versions, toujours comme dans Rashomon, pour te trouver enfin devant des rangées de chats qui te saluaient, te remerciaient d’avoir fait pour eux tout ce chemin, sous cette pluie… Tu t’es inquiété plus tard : enfin, dans toute l’Asie, le chat traîne une sale réputation. N’est-il pas le seul animal à être arrivé en retard à la mort du Bouddha ? Justement, a-t-on répondu. On doit être d’autant plus compatissant envers lui qu’il porte cette faute. Et cette façon de soutenir le plus faible, to side with the undercat, mise en regard de la réputation établie — et justifiée — de cruauté des Japonais, t’a ouvert une nouvelle fenêtre.

当你第一次带着这些关于猫的故事回到欧洲时,你的朋友把这个故事看作是疯子用来满足他疯狂的证明。必须向他们展示自性院的照片——豪德寺的猫墓地,以及寺内好几十只被排成一排排的招财猫;向他们证明,在银座中央区1-16-1街区,孩子们画了一个猫咪版本的跳房子游戏,一只真正的小猫在那里午睡;向他们发誓,一只猫在新桥的混凝土上留下了它的名字缩写。然而直到你打开京文社1980年出版的一本书,里边有条不紊地列举了东京所有与猫相关的地方,你方才觉得他们有点动摇了。看到印在光亮的纸上的、带着地理学家般仔细的提示,提示着前往Iriya餐厅最可靠的路线;那儿,人们在自由奔跑的猫儿中间用餐,这给人留下极深的印象。然后你可以更好地告诉他们你的其它遭遇,在去往豪德寺的火车上与一对双胞胎的相遇(当时就像《罗生门》中一样在下雨),你还不知道寺庙在哪儿,你通过说“neko”,并以佛教祈祷的姿态合掌来让路人停下脚步。虽然他们都能领会,但不是所有的人都明白。你花了一个小时,并换了好几种说法,就像在《罗生门》中一样,终于发现自己抵达一排排的猫儿面前,它们向你问候,感谢你在这样的大雨中为它们远道而来……你后来担心:毕竟,在整个亚洲,猫的名声都很不好。它难道不是唯一在佛祖去世时迟到的动物吗?“没错,”人们如此回答。“我们必须对它更有同情心,毕竟它承担了这个过失。”这种与最弱者站在一起的方式,to side with the undercat,与日本人一贯的——也是确切的——残忍之名相对照,为你打开了一扇新窗户。

A Shinjuku encore (décidément tu y passes ta vie), sur le toit des petites boutiques qui bordent la sortie sud du tunnel pour piétons, un chat t’a salué des deux oreilles. Depuis, tu n’as jamais pu emprunter ce passage sans revoir ce chat. Le matin, tu avais photographié l’un des vice-présidents de la riche et puissante secte du Reiyukai Shakaden à l’instant où il vitrifiait un gardien par sa seule entrée, et ce sourire de chat t’a paru incarner tous les contre-pouvoirs du monde. Un autre jour, tes amis japonais, que ta folie intéresse, t’ont emmené au temple laïc des chats, Nekomaya, la boutique où l’on trouve tous les objets, tous les livres, toutes les images et même de la nourriture pour chats, première pierre d’une internationale qui s’est déployée à San Francisco avec Wholly Cats et à Paris avec Au chat dormant, rue du Cherche-Midi, sur le même trottoir que le fleuriste. Entre-temps tu avais appris non seulement à prononcer “neko” mais à l’écrire. Un grand trait et deux petits, en panache, pour la queue : un animal. Un rectangle consolidé d’une croix : le champ de riz. Deux petits traits verticaux biffés d’une barre horizontale, rageuse, fuyante : la course. Au Japon, le chat est un animal qui court dans un champ de riz.

还是在新宿(你一定是那里度过了你的一生),在人行通道南面出口两旁小商店的屋顶上,一只猫以双耳向你问候。从那时起,你每次取道此地时都能看到这只猫。早晨,你曾拍到权贵的灵友会释迦殿的一位副会长,他在唯一的入口用玻璃塑造了一位猫守卫,而那只猫的笑容对你来说,似乎体现了世界上所有的反作用力。又有一天,你的日本朋友对你的疯狂产生了兴趣。他带你到世俗的猫庙Nekomaya去,在那里你可以找到有关猫的所有,所有的书,所有的图片,甚至还有食品。这是某种国际化的里程碑,它已经和旧金山的Wholly Cats和巴黎的Au chat dormant建立了联系,后者位于Cherche-Midi路上,和花店在同一条人行道旁。在此期间,你不仅学会了“neko”怎么说,还学会了怎么写。一条大线和两条小线,尾巴是羽制的(犭):动物。长方形被一个十字架所固定着(田):稻田。两条小的竖线被一条横着的、汹涌的、逃窜的横条划去(艹):奔跑。在日本,猫是一种在稻田里奔跑的动物。

Le soleil est maintenant haut sur Tokyo. La télévision en est déjà au feuilleton du matin. Devant les rideaux baissés, les dames doivent attendre l’ouverture du grand magasin Sogo, à Yurakuccho, celle de Mitsukoshi et de Sanai au grand carrefour de Ginza (une statue de chat en pierre à l’ombre de la tour de Sanai). Un bloc plus loin, M. Akao va commencer de prêcher contre le communisme international comme il le fait pratiquement tous les jours depuis vingt-cinq ans. Dans les buildings d’Otemachi, le Japon projettera glorieusement, face au palais impérial, l’image à laquelle il se résume pour beaucoup, et pour laquelle beaucoup l’admirent, mais il suffira d’une délégation de campagnards croisés dans le hall du Yiomiuri Shimbun pour que tu ressentes une fois encore ce qu’il reste de soie dans cet empire de marbre.Tu te lèves, tu vas à la fenêtre. Juste au-dessous de toi, sur la tôle ondulée du hangar attenant à l’hôtel, deux chats, un noir et un blanc te saluent. Au moment où tu prends la photo, celui de droite, le noir, a pour toi un regard qui est si exactement celui du chat Whisky, à l’autre bout du monde, dans une autre vie, que tu chavires un petit instant et que — une fois n’est pas de coutume — tu t’approuves d’avoir écrit un jour que le passé, c’est comme l’étranger : ce n’est pas une question de distance, c’est le passage d’une frontière.

现在,太阳在东京上空高悬。电视机已经播放着早间杂闻。在放低的卷帘门前,女士们不得不等着百乐町的崇光百货开张,亦或是银座巨大的十字路口的三越百货和酒井百货(酒井百货大厦的阴影底下有一个石猫雕像)。在一个街区外,赤尾先生将开始他反国际共产主义的布道,正如他在过去25年中几乎每一天所做的那样。在大手町的建筑里,日本将面朝皇宫光荣地展示它为许多人所总结出的形象,这形象为许多人所钦佩;但仅仅一个在《读卖新闻》总部大厅里与你擦肩而过的乡民代表团,已经足以让你再次感受到,在这个大理石的帝国中仍然留存着丝绸。你站起来,走到窗前。就在窗户下,在酒店旁边的棚子的波纹铁皮上,两只猫,一黑一白,向你问候。当你拍照的时候,右边的那只,黑色的那只,看你的眼神是如此的相似,仿佛和世界的另一端,和另一种生活中的那只猫“威士忌”一样,以至于你有一瞬间不知所措,而且——这一次——你同意你之前写下的一句话,过去仿佛异乡人:这并非在于距离,而是在于对边界的跨越。

2

Celle-là, tu l’as nommée la Derelitta. Contrairement à une légende tenace, les trains de Tokyo ne sont pas toujours bondés, on n’a pas toujours besoin des pousseurs en gants blancs qu’aucun film ne nous épargne. On peut passer des journées entières à naviguer de train en métro, de souterrain en aérien, sans être beaucoup plus bousculé qu’à Paris ou à New York (et plus courtoisement en tout cas, même si on ne se fait pas de cadeau pour ce qui est d’occuper les places assises), avec de grands passages à vide qui permettent de choisir stratégiquement son angle ou son vis-à-vis. Commence alors la chasse aux dormeurs. Ils te fascinent. Tu prends le train pour les voir, tu oublies tes rendez-vous, tu ignores les correspondances pour rester quelques minutes de plus devant le court-métrage absolu, le gros plan idéal d’un visage de dormeur ou de dormeuse. Leur sommeil libère une gamme d’expressions que la tenue sociale et le souci de l’apparence refrènent à l’état de veille, et tu peux lire sur ces visages endormis toute leur histoire, sourire et crispation, dodelinement et extase. Combien de scénarios as-tu inventé ainsi — cette femme par exemple, entre Kobé et Osaka, dont pendant une heure tu as suivi toutes les saisons, les sautes rapides et confuses comme le balaiement d’un tableau d’aéroport où, chaque nom de la ville se brouille dans l’autre. Pendant une heure tu as guetté ses métamorphoses avec (presque) autant d’attention exigeante que la montée du plaisir sur un visage aimé. Ne cherchez pas, elle n’est pas entre ces pages. Il existe une centaine de photos d’elle, mais les publier, c’était la trahir.

你把这位女士称作Derelitta。与一个挥之不去的传说相反,东京的火车并不总是拥挤的,并不总是非得有那些成日戴着白手套推来推去的形象,然而所有的电影都不遗余力地向我们展示这些形象。人们可以花上一整天的时间,从火车到地铁,从地底到高架桥上,而不会像在巴黎或在纽约一样到处被推搡(在任何情况下都更有礼貌,即使是在占座这一排他的行为里),加以车厢里大量的空通道,让人们可以战略性地校正自己的角度或目光。然后开始寻找熟睡者。他们让你着迷。你搭上车就是为了去看他们,你忘记了你的约会,你坐过了换乘站,为的就是在这些纯粹的短片前多待上几分钟,这是熟睡者面部的理想特写。他们的睡眠释放出了一系列在清醒时被社会行为和对外表的关注所压抑的表情,你可以在这些熟睡的脸庞上读到他们全部的故事,从微笑和紧张,从点头和狂喜。你以这种方式发明了多少场景呀——例如这个女人,在神户和大阪之间,一小时内你已经度过了四季,快速而混乱的摆动,就像在扫视飞机时刻表,每个城市的名字都模糊地融入另一个。在这一个小时里,你守候着她的千变万化,带着和那张惹人爱的脸庞上浮现的欣喜(几乎)同等程度的急切关注。别找了,她不在这些书页间。有上百张她的照片,但公布这些照片就等于背叛了她。

Tu reviens de Hong Kong, huître à cent mille perles, et dès le premier train (celui qui, de l’aéroport de Narita, te mènera droit à ta chère Yamanote Line, court-circuitant l’interminable trajet par la route) la gentillesse japonaise te happe le cœur. Qui saura chanter comme il convient l’hospitalité des xénophobes ? C’est parce qu’il y a quelque chose de réellement tragique, d’irrémédiablement fautif dans le malheur de n’être pas Japonais qu’on doit avoir pour l’étranger toutes les prévenances (comme pour le Chat). Tu montes les marches de l’escalier de la gare, et tout d’un coup ton sac pèse moins lourd à ton bras. Une robuste campagnarde s’est emparée de l’anse droite, et t’amènera ainsi jusqu’au quai, où vous échangerez remerciements et courbettes. Un homme tourne autour de toi : tu le reconnais, c’est celui à qui tu avais demandé, en volapück, le numéro du quai. Ce n’est pas son train, il n’a rien à faire ici, il va repartir dans un instant après nouvel échange de salutations : il est simplement venu vérifier que tu avais bien compris, que tu ne risquais pas de te retrouver à Yamaga, à Aomori,le maudissant. Dans le train, tu t’enquiers du nombre de stations avant la correspondance (tu pourrais regarder sur le plan, mais c’est tellement plus amusant de jouer Passepartout). Un jeune type commence à énumérer sur ses doigts, comme une comptine. Visiblement il se trompe, parce que les filles de son groupe se mettent à rire, la bouche à demi cachée par la main en coupe, comme rient les Japonaises (le plus sûr moyen de dépister les travelos, c’est de les faire rire). Un autre s’y met, s’embrouille aussi, tout le wagon se marre. Le sketch durera jusqu’à la bonne gare, où naturellement tu seras conduit d’une main sûre. Tu as parcouru ainsi le Japon d’Hokkaido à Okinawa, avec comme seul bagage linguistique, outre les indispensables formules d’excuses et de remerciements, les différentes combinaisons du mot neko, et de chaque étape tu gardes le souvenir du commerçant qui a quitté sa boutique pour te conduire au pied de l’immeuble que tu cherchais, de la gardienne du cimetière des chats (neko dera) à Osaka qui t’a escorté pendant vingt minutes, absolument pas découragée par le caractère limité de ton vocabulaire et te comblant de confidences, pour te laisser sur une grande artère pourvue en autobus (ce qui veut dire aussi, bien sûr, que toi, stupide étranger, tu n’aurais pas été capable de la trouver tout seul — mais comme la condescendance courtoise est plus plaisante que l’égalité hargneuse…). Ce commerce prend aussi des formes plus étranges. Dans un de ces charmants petits trains d’Hokkaido, bois sombre et velours vert, qui auraient plu à Larbaud, tu guignes le magazine que lit ta voisine parce que tu y as entrevu un article illustré sur les takenoko, les petits danseurs du dimanche dans le parc de yoyogi, et qu’il t’a semblé reconnaître une des fillettes que tu avais toi-même photographiées. Sans avoir en rien exprimé ton intention, tu formes dans ta tête le projet de lui emprunter poliment le magazine quand elle sera au bout de sa lecture. Sur quoi, toujours lisant, elle s’assoupit. J’attendrai son réveil, penses-tu. Le réveil a lieu quelques minutes plus tard et immédiatement elle te tend le magazine. Bien reçu. L’harmonie a encore frappé.

你从香港回来了,像一颗拥有十万颗珍珠的海蛎。第一班火车直接将你从成田机场带到亲爱的山手线,避开了漫长的路途。从此,日本的友善立刻俘获了你的心。谁知道如何歌颂这群排外之人的好客呢?正是因为,非日本人就意味着某种真正悲惨的、无可救药的不幸,所以他们必须对外国人(就像对迟到的猫一样)表现出全部友善。你走上车站的楼梯,突然你手上的行李一下子变轻了。一个结实的乡下女孩握住了行李右边的把手,她会把你带到站台上,在那儿,你们将相互致谢、鞠躬。一个男人在你身边徘徊:你认出了他,你曾用沃拉普克语(volapück)向他询问站台号码。这不是他的那趟火车,他在这里无所事事,你们再次相互寒暄后,他马上就会离开:他只是来看看你有没有明白他的意思,一边看你是否会坐错站到了山贺或者青森,一边咒骂着青森这个地方。在车上,你到处打听列车在到达你的换乘站之前要经过多少站(你本可以查地图的,但扮演路路通1的感觉好玩多了)。一个年轻人开始用指头数数,就好像在唱儿歌。但很明显他数错了,因为他那组的女孩们开始发笑,她们用捂住的手半掩着嘴,像日本女人那样笑着(若想发觉男扮女装者,最可靠的方法就是让他们发笑)。另一个人也开始算数,随之也被搞糊涂了,整个车厢都笑了。这出喜剧会一直持续到你到达正确的车站为止,当然啦,你会被安安稳稳地带到那里。从北海道到冲绳,你随身的语句库里除了必要的道歉和感谢之外,只有neko这个词的不同组合。在旅途上的每一步,你都记着那位走出他的小店然后带你去到那幢你在寻找的建筑的店主;记着大阪猫咪墓地(neko dera)的看守人,她陪同你走了20分钟,毫不因你词汇的贫瘠而泄气,反而使你充满了希望,直至走到一条大巴川流不息的主干道上。(当然,这也意味着,你这样一个蠢外国佬,断不可能自己找到路——但,礼貌的俯首还是比尖刻的平等更令人愉快……)这种交易也偶有更奇怪的形式。在那些迷人的北海道小火车中,褐色的木料和绿色的天鹅绒想必会让瓦列里·拉尔博(Larbaud)愉快不已。你瞟着你的邻座在读的杂志,因为你看到了一篇关于“竹之子(takenoko)”的插图文章,这是在代代木公园的一群周日小舞者,而且你似乎认出其中一个你曾经拍摄过的女孩。你没有以任何方式表达你的意图,只在你的脑海中形成了这样的计划:当她读完后,礼貌地从她那里借走杂志。随后,她在那本杂志上打起了瞌睡。“我会等到她醒来”,你这样想。几分钟后她醒了,立即把杂志递给你。你接过来。和谐再度降临。

Comme tu crains toujours d’avoir l’air d’en raconter plus que tu n’en sais, tu t’abstiendras de vaticiner sur le hyoshi (cette “intégration des cadences” — Kenji Tokitsu). Mais ce que la tête n’est pas sûre de savoir énoncer, ta peau l’a ressenti plus d’une fois. Quand on parle d’harmonie à propos du Japon, tout le monde pense au fameux consensus social, la droite se pâme, la gauche se convulse. Toi tu penses à autre chose, à ce réseau vaporeux de rites, de signes, de cultes auxquels chacun affecte de ne pas croire, ou si peu, mais qui vient si souvent démentir l’arrogance du pragmatisme et de l’efficacité, si gracieusement meubler le vide qui demeure entre l’entreprise humaine et le grand gouffre de la nature. Comme s’il y avait toujours, à l’horizon de tout événement, de toute action, ne disons pas un au-delà, ce serait trop métaphysique, plutôt un entre-deux, qui ne doit pas être loin du je-ne-sais-quoi de Jankelevitch. Comme si, l’hymne à la machine bien clamé, les verrous sociaux bien vissés (et Dieu sait s’ils le sont), il restait encore une place à remplir, une plus-value de l’esprit. Alors cet entre-deux, cet entre-chat-et-loup, cet innommé réparti entre les huit cent huit dieux qui ont la garde du troupeau des rêves, on ne sait pas trop quoi en faire, on ne sait pas bien comment s’adresser à lui, mais du moins on peut être poli. D’où la politesse à l’égard des ancêtres, d’où la politesse envers les bêtes (ces innombrables fêtes de réconciliation — avec les oiseaux, quand les danseuses de l’Awa Odori dans Koenji les appellent poliment par leur nom — avec les poissons, quand les hommes de Morosaki au sud de Nagoya les prient de se laisser poliment pêcher), d’où au cœur de cette société aussi impitoyable qu’une autre, un respect d’autrui qui coexiste paisiblement avec la course de rats. Finalement, la civilisation matérialiste du Japon est peut-être obsédée par l’esprit de la même façon que la civilisation chrétienne l’est par la chair. A travers ses ancêtres, ses dieux, ses bêtes et ses esprits au pluriel, envers du décor si parfaitement agencé qu’on finit obligatoirement par s’interroger sur l’envers de cet envers, c’est peut-être bien l’esprit lui-même, cette abomination spiritualiste si justement dénoncée par toute la pensée moderne, qui est présent et qui enracine tout. Un Japon peut en cacher un autre. Aux temps légendaires de la pensée-maozedong, certaine dévote avait énoncé une proposition dont la profondeur pataphysique n’a jamais cessé de t’émerveiller : il s’agissait de la fameuse lutte entre les deux lignes, et l’une “avait pour caractéristique de se faire passer pour l’autre”. (Relisez si vous n’êtes pas sûr de n’avoir pas compris.) Faut-il se demander quel Japon se fait passer pour l’autre ? Ne le demandez surtout pas à un Japonais. Rien ne l’agace et ne l’horrifie autant que ces questions occidentales tranchées : oui, non, l’un, l’autre, le tiers exclu, Aristote et le père Ubu. Ne lui tendez pas le reptile de la certitude : tout son être se révulse à l’idée d’y toucher. Laissez-le à sa tranquille schizophrénie, à sa façon de voir en toute chose son contraire, et plus vivement ressentie la chose, plus impérativement convoqué le contraire qui court à sa rencontre comme l’ombre de King Kong sur l’asphalte de Manhattan. Regardez-le plutôt quand il se déguise en son ancêtre, quand il est figurant de Shohei Imamura dans le film Eijanaika, minutieuse reconstitution de l’époque Edo jusqu’à la reconstruction en dur de l’illustre pont arrondi de Ryogoku, celui qu’on voit sur les estampes. Abolie la façade de modernité, envolée cette pellicule d’américanisation qui le protège par l’imitation de son environnement, comme certaines espèces animales, et vous avez devant vous un Japonais du Moyen-Age, inchangé, peut-être inchangeable. A cela près que la jeune génération, elle… Oui, peut-être. C’est ce que disaient les pères des pères d’aujourd’hui, quand la jeune génération, c’était eux. Toi, tu n’y crois pas à ce Japon américain, tu penses que le Japonais est un guerrier qui s’est fait un bouclier avec un miroir. Et que le “vrai Japon”, comme disent les magazines, n’apparaît que par mégarde, dans l’entre-deux, quand une interviewée de la télévision, à la question “que souhaitez-vous ?” fait cette réponse qui laisse loin derrière elle tous les mots de stoïciens avec lesquels on a bassiné notre jeunesse : “Que ma mort dérange le moins possible.

由于你总是害怕自己给人以“说的比实际懂得的更多”的印象,你干脆避免去预测言语的“拍子(hyoshi)”(即时津贤儿所称的“韵律的整合”)。但是,在脑袋里不知道如何表达的东西,你的皮肤已经不止一次地感受到了。当你谈论日本社会如何和谐时,每个人都会想到那著名的共识:右翼呆滞,而左翼惊厥。你想到的其实是别的东西,是这个由仪式、符号和崇拜组成的虚无缥缈的网络,每个人都假装不相信,或者只相信一点儿,但它往往掩盖了实用主义和效率至上的傲慢,并且如此优雅地填补了人类行为和自然之巨大深渊之间的空白。仿佛这网络在任何事件、任何行为的地平线上始终存在着——不要说“超越”(au-delà),那样太形而上学了——“间隙”(entre-deux)。它一定离杨科列维奇笔下的“我所不知之物”(je-ne-sais-quoi)不远。就好像,当赞颂机器,亦拧紧社会的螺栓之时(上帝会知道它们被拧紧了的),还有一个地方需要被填满,一种精神的剩余价值。因此,这个介于二者之间,这个介于猫和狼之间(entre-chat-et-loup),这个分配给守护梦境的八百零八位神灵的无名之物;我们实在不知道该如何对待它,我们实在不知道该如何与它打交道,但至少我们可以礼貌一些。也就是说,对祖先的礼貌;也就是说,对动物的礼貌(那些数不胜数的和睦的节庆——与鸟类的和睦,这时,高円寺的阿波舞者会有礼貌地念诵它们的名字——或者与鱼类的和睦,这时,名古屋南部的森崎人会恳求鱼群,请允许他们有礼貌地捕捞);这也就是说,在这个与其他社会一样无情的社会的深处,对他人的尊重和你死我活的竞争,二者相安无事地共存着。最后,也许就像基督教文明迷恋肉体一样,日本的物质主义文明迷恋着精神。通过它的祖先,它的神明,它的动物和它复数意义上的精神(ses esprits au pluriel),这种井然有序的背面,我们最终不得不思考这个背面的背面,也许就是精神本身。这可鄙的唯灵论被所有现代思想有理地诘难,然而它确实存在,它扎根于一切。一个日本可能藏在另一个日本之中。

在毛泽东思想风靡的年代,某位狂热者阐述过一个命题,其形而上的深度每每使你赞叹不已:这就是著名的两条路线之间的斗争,其中一条路线“有着冒充另一条路线的本性”(如果你不确定是否读懂了的话,请再读一遍)。所以,应该讨论哪个日本在冒充着另一个日本吗?千万不要以这个问题来问一个日本人。没有什么比这些非此即彼的西方式提问更让他恼火和恐惧的了:是的,不是,一个,另一个,被排除的第三个,亚里士多德和愚比神父(译者注:père Ubu,阿尔弗雷德·雅里《愚比王》中的角色)。不要把爬行着的确定性递给他:他全身心对触摸这确定性的想法感到反胃。让他和他沉默的精神分裂待一起吧,还有他在一切事物中看到反面的方式,对事物的感觉越敏锐,就越急迫地要召唤反面;反面亦奔向它与正面的会面,就像金刚硕大无朋的阴影投射在曼哈顿的柏油马路上。看吧——当一个日本人乔装成他的祖先时,当一个日本人在今村昌平的电影《乱世浮生》中担任着临时演员时;《乱世浮生》细致地重现了江户时代,剧组为此甚至不辞辛劳地重建了圆滚滚的两国桥,这座桥现在只能在版画上看见了。扒掉现代性的外衣之后,这卷通过模仿周围的环境来保护他的美式电影也消失掉之后——就像某些伪装在自然环境里的物种一样——你面前立着的就是一个来自中世纪的日本人,一点也没变,也许其实是不可变的。除了年轻一代……是的,这一代也许会。当年轻一代是他们的时候——今天的父辈们如是说。你不相信这个美国的日本,你认为日本人就是一个用镜子当盾牌的武士。而“真正的日本”,就像杂志上说的那样,只是在不经意间出现,在间隙里。当一个受访者在电视节目里被问到“你希望什么”时,他的回答远远抛开了我们年轻人被灌输的种种斯多葛式的言辞:“我希望我的死去不要给别人带来麻烦。”

3

Ce n’est pas seulement la lecture assidue de Jorge Semprun qui m’a fait employer, depuis le début de ce texte, le tutoiement romanesque. Plutôt l’envie instinctive d’établir une distance entre celui qui, de septembre 1979 à janvier 1981, a pris ces photos au Japon, et celui qui en février 1982 écrit à Paris. Ce n’est pas le même. Pas pour des raisons platement biographiques : on change, on n’est jamais le même, il faudrait se tutoyer toute sa vie. Mais je sais que, si je retourne demain au Japon, j’y trouverai l’autre, j’y serai l’autre.

不仅因为我是豪尔赫·桑普伦(Jorge Semprun)的忠实读者,使得从本文一开始我就采用了小说式的第二人称叙述;不如说是因为我本能地希望,在自1979年9月到1981年1月于日本拍下这些照片的人,同1982年2月在巴黎写作的人之间,架起一段距离。他们是不一样的人。不是单纯是因为传记体裁的原因:人总在变化,人永远不会是同一个人,人应该一生都以第二人称来自称。但我知道,如果我明天就回到日本,我将找到那另一个人,我将成为那另一个人。

Que la politesse japonaise me préserve au moins d’ennuyer le lecteur (hypothétique, car je doute que quelqu’un ait jamais lu le texte qui accompagne des photos) avec mes problèmes de dédoublement. Ou bien il faudrait leur donner la forme fastueuse et colorée des histoires de Doubles japonais, ces contes où le prince se déguise en clochard aveugle, où l’homme se transforme en cheval (l’adaptation télévisée du Si Teou Ki, avec la sublime Natsume Masako), où le chat se change en femme. Celle-là, c’est le Bake-neko, la sorcière-chatte, et vous n’y couperez pas. Je ne sais pas combien il s’est fait de films sur la Bake-neko. Qu’ils soient tous ignorés en Europe en dit long sur la culture de cette petite péninsule caractérielle. (En Amérique, on peut les voir sur la côte Ouest, grâce aux stations de TV japonaises.) Le déroulement est toujours le même : un homme est assassiné. Le chat, témoin du meurtre, fait entrer son esprit dans le corps d’une femme — et là, quelle que soit la version, il y a toujours une scène prodigieuse, celle où la femme commence à mêler, dans ses gestes, le comportement du chat au sien, quand elle se met à griffer lentement l’air avec sa… patte, quand elle se met à laper au lieu de boire. Cette femme va devenir l’instrument de la vengeance, et les meurtriers, elle va leur faire passer le goût du saké. Mais ce qui est très caractéristique, c’est que ce personnage de vengeresse somme toute sympathique au regard de la morale populaire va inévitablement en faire trop. La vengeance déchaînée s’étend à d’autres innocents, le sang coule à flots, et rituellement (après qu’on ait eu droit par exemple, pour citer un des plus beaux fleurons du genre, à sa tête coupée volant au-dessus des maisons) le conte s’achève par la mort cruelle de la femme-chat qui reprend son apparence, comme le Docteur Jekyll et l’homme invisible. La violence une fois lâchée, le désordre est partout, il ne peut pas se satisfaire d’une élémentaire loi du talion, meurtre pour meurtre ; toute idée de justice, de réparation est dérisoire, la violence ne s’achèvera qu’en s’engloutissant elle-même, comme un volcan.

但愿这种日式礼貌,至少能让读者不至于因我的双重人格问题而被惹恼(假设我有读者……因为我不确定是否有人会读一读这些照片的附文)。又或者,应该给我的双重人格加上那些像日本化身传说一样丰富多彩的形式。在那些故事里,王子化装成盲人流浪汉,男人变形成马(电视改编的《西游记》,有着极高人气的夏目雅子出演),而猫变化成女人。这部片子叫化猫(Bake-neko),也就是说巫婆猫,你们绝不能错过。我不知道日本人究竟拍了多少关于化猫的电影,它们在欧洲都被忽略了,这一点已充分说明这个小半岛的文化有着自己的特色(不过,由于日本电视台的放送,也可以在美洲的西海岸看到这些电影)。情节总是一样的:一个男人被谋杀。猫呢,则目睹了这起谋杀,并且自己魂穿到一个女人的身体里——然后,不管是哪个版本,总是有一些极为惊人的场景。例如,这个女人开始把猫的行为和她自己的行为混淆起来,她开始用她的……爪子轻挠空气,她开始舔着喝水。这个女人将成为复仇的工具,而对凶手,她将招待他们品清酒。然而极具特色的是,这个总归是同情大众道德的女复仇者的角色,难免会做过火。脱缰的复仇之火将烧到其他无辜者身上,血流成河,并且仪式性地(例如,我们可以引用类型片中最棒的例子之一:被砍下的头颅飞过房屋),故事以猫女残酷的死亡结束,她恢复了自己的外表,就像《化身博士》里的杰基尔博士和隐形人。暴行一出,天下无序,它绝不满足于复仇的基本原则:以牙还牙;任何关于正义或者赔偿的想法都是可笑的,暴力只会像火山一样以吞噬自身而结束。

Quand on est capable de cette violence-là (et les nations occupées par les Japonais pendant la Seconde Guerre mondiale en savent quelque chose) et qu’on a également reçu le don d’apprivoiser toute chose avec son contraire, il n’est pas impensable que s’établisse un très étrange et peut-être précaire équilibre entre une réalité policée et un imaginaire sanguinolent. Cela s’est vu ailleurs, et après tout la catharsis n’est pas brevetée chez Sony. Ce qui est plus troublant au Japon, c’est qu’on a l’impression que l’imaginaire règle ses comptes avec lui-même, que lui aussi est double et que finalement il ne s’agit pas d’exorciser la violence du monde par le spectacle du rêve, mais de livrer dans l’espace du rêve un combat, le spectacle d’un combat dont l’enjeu est précisément le monde. Quand je vois à la télévision les héros des chambaras, les feuilletons de samourais, je les vois “navrés” à la fois dans le sens ancien et moderne du mot, c’est-à-dire trucidés (c’est souvent ce qui leur arrive) et désolés de ne rien trouver d’autre. Comme si les Japonais naissaient navrés, sachant tout sur la violence, sur le monde et sur la mort, n’ayant qu’une vie pour s’excuser de tant d’imperfections, prompts à s’émerveiller devant tout ce qui retarde, fût-ce d’une seconde, l’inévitable catastrophe (un corbeau qui passe, un criquet qui crie, une montre à hibou, la rousseur d’une plante), épouvantés devant l’abîme, résignés pendant la chute. La scène finale du chambara, c’est le moment où, tout ayant échoué, l’intelligence, la ruse, le bon sens et l’intrigue, il ne reste plus qu’à se jeter sur l’adversaire, navré d’en arriver là, navré que la vie ne soit qu’une éternelle chute, le sabre en avant, dans une immense flaque de sang, avec sur le visage et dans le regard tous les signes d’une terrible, dérisoire et nécessaire pitié.

当一个人有能力实施这样的暴力时(二战期间曾被日本人侵略的民族对此会有所了解),而且还被给予了驯服一切事物及其反面的天赋,在开化的现实和血腥的想象(imaginaire)之间,要建立一种非常奇怪的、可能不太稳定的平衡,也就并非是不可设想的了。这从他处也能看到,毕竟情绪的宣泄法(catharsis)也不是什么索尼的专利。在日本,更加令人不安的是人们有着这样的印象:想象要与想象自身算账——想象也是双重人格的,最终问题不是通过梦的景象来驱除世界的暴力,而是要发动一场在梦境中的战斗,赌上整个世界的命运。当我在电视上看到剑斗(chambaras/ちゃんばら),即武士连续剧中的英雄决战时,我看到了无论古今的说法中都有的“抱歉”,也就是说,被杀戮(这通常是降临到他们身上的命运),并为除此之外再无事发生而感到抱歉。仿佛日本人生而抱歉,他们对暴力、世界和死亡了如指掌,毕竟,只有短短一生来为这么多的不完美而抱歉,他们也就敏锐地赞叹一切能延缓必然之灾祸的事物(一只路过的乌鸦、一只惊叫的蟋蟀、一只猫头鹰表、一株红棕色的植物),哪怕只能延缓一秒钟。在深渊前颤栗,在坠落时不甘。剑斗的最后一幕是这样的时刻:全都失败了,智慧、狡猾、常识和阴谋,最后所剩的只有大吼一声、扑向对方,为事情竟会至此而抱歉,为生命不过是永恒的坠落而抱歉,剑锋向前,倒在庞大的血泊里,脸上和眼中尽是可怖、讥笑和不可或缺的怜悯意味。

Cet été-là, les murs de Tokyo étaient couverts d’affiches aux caractères lézardés, comme le seront ces murs eux-mêmes un jour. La certitude du Big Quake est totale, chez les Tokyoites. Cela leur donne une forme d’humour assez berlinois. Cela s’accorde aussi pas mal avec ce sentiment de la précarité de toute chose, ce Mono no Aware intraduisible, comme Sehnsucht, comme saudade, ces mots vagues qui détiennent sans doute un sens trop précis (et pourtant, Simone, je t’accorde que le mot nostalgie est un très beau mot, mais il ne couvre pas tout, l’entre-deux est encore là). La rumeur avait même conféré une date au grand tremblement de terre. A la place, nous en avons eu deux petits, deux nuits de suite à la même heure (ce qui est proprement incroyable : le temps de la terre épousant celui des horloges). Bizarre de s’endormir dans une chambre calme, et de se réveiller dans la cabine d’un train fou, dont les cloisons secouées jettent par terre les verres, les livres, une scène de ménage de la planète, avec la conscience qui s’essouffle à faire rentrer dans le rang une peur animale, réveillée avant elle, celle précisément des animaux annonciateurs de séismes. Je regardais les corbeaux, leurs cris étaient les seuls signes de vie par-dessus le grondement de la terre, je cherchais à imaginer ce qui se passait dans leur tête. Le lendemain, Keiko m’a dit : “ ça ne m’étonne pas. Tout le monde en parle, tout le monde le prévoit…. Alors, là-dessous, quelque chose est remué. (Down there, something is moved. ” Et Ichiro, me désignant les corbeaux : “ La nuit dernière, je me demandais ce qu’ils pensaient. ”

那年夏天,东京的墙壁上贴满了带有裂纹的海报,似乎墙本身有一天也会变成这样。大地震,对东京人而言是确切的。这给了他们一种柏林人式的幽默。它也相当符合这种万物都脆弱敏感的感觉,这无法翻译的物哀(Mono no Aware),就像Sehnsucht(痛苦的思念),就像萨乌达德(saudade)2,这些模糊的词无疑拥有太精确的含义(然而,西蒙娜·薇依,我同意你:尽管怀旧(nostalgie)是一个非常美的词,但它并不能涵盖一切,“间隙”仍然存在)。有说法甚至预测了在某日将有大地震。与之相反的是我们经历了两次小地震,连续两晚在同一时间段(相当不可思议:地球的时间与钟表的时间相吻合)。真是怪事:在一个安静的房间里睡着了,却在一辆疯狂的列车车厢中醒来,车厢里摇晃的隔板把杯子和书扔到地上,这就是地球在打扫的场景。意识正挣扎着召回一种动物性的恐惧,在它面前,本属于那些宣告地震来临的动物性恐惧被唤醒。我看着鸦群,它们的叫声是地球的轰鸣中唯一的生命迹象,我试着想象它们的小脑袋里发生了什么。第二天,惠子对我说:“我并不惊讶。大家都在说这场地震,大家都预见了它……所以在那下边,就有东西被移动了。”(Down there, something is moved.)而一郎则指着乌鸦说:“昨天晚上,我好奇它们究竟在想什么。”

Nous sommes allés cet après-midi-là au temple des chats à Go Ku Ji. Derrière le temple, il y a un cimetière humain. Les tombes de chats sont identiques aux tombes d’hommes, elles ont des tailles de chats, c’est tout. Chats et humains sont séparés par un petit muret, j’imagine les ombres de chats assez agiles pour l’enjamber, assez malicieuses pour aller piquer des offrandes chez les hommes et les ramener en ronronnant. K n’a pas prié : sa mère lui avait bien recommandé de ne pas le faire. Quand on prie dans un cimetière étranger, on risque de ramener, attachées à soi, des âmes étrangères. J’ai quitté Tokyo quelque temps après. Le jour du départ, nous sommes allés rendre hommage aux quarante-sept ronins, ces samourais fidèles qui vengèrent leur maître et se suicidèrent ensuite pour que le désordre soit réparé, comme la Bake-neko. Beaucoup de gens viennent prier sur leurs tombes. J’y ai fait ma dernière photo. Comme je pensais à la longueur du trajet jusqu’à Narita, j’ai regardé ma montre. Nous étions trois, les deux filles et moi. Les ronins étaient quarante-sept. Ma montre disait “ 3 : 47 ”. Je la leur ai tendue, il n’a pas été nécessaire de dire quelque chose. C’était un moment d’harmonie.

当天下午,我们去了豪德寺的猫庙。在庙后面,有一块人类的墓地。猫的坟墓与人的坟墓大抵相同,唯一的差别只是它们有着猫的大小。猫和人被一堵矮墙隔开,我想象着猫的影子足够灵活,可以翻越这座矮墙,顽皮地从人那里偷取供品,然后呼噜呼噜地把它们带回这一边。K没有祈祷:她的母亲告诫过她不要祈祷。当你在异国墓地祈祷时,你就有可能把附在你身上的异国灵魂带回来。一段时间后,我离开了东京。离开的那天我们去祭拜了四十七士,这些忠诚的武士为他们的主人报了仇,随即自杀,这样就可以像化猫一样使混乱彻底结束。许多人来到他们的坟墓前祈祷。我在那里拍了我最后一张照片。当我想到去成田机场的漫漫旅途时,我看了看表。我们是三个人,两个女孩和我。浪人们则是四十七个人。我的表上写着“3:47”。我把表递给她们看,无须说话。这是一个和谐的时刻。

Son cosas de mi pais, comme on dit à Cuba. Mon pays imaginaire, que j’ai peuplé des mythes qui remontent à mon enfance, quand je lisais Flash Gordon et que l’Utopie, pour moi, c’étaient de grandes villes rutilantes, parcourues d’avenues surélevées où des gens un peu chats, un peu Asiates, allaient et venaient sans cesse… Mon pays où des Asiates un peu chats jouent au base-ball devant des éléphants en cage, où les villes souterraines sont rafraîchies par des fontaines bordées d’un clavier de dames pleines et de dames creuses. Un enregistrement d’oiseau monté en boucle rappelle que, sept étages au-dessus, les oiseaux existent peut-être. Mon pays où personne ne démêlera jamais les vélos emmêlés, où l’écrivain public ne recevra jamais une réponse d’Alain Delon, où le message confié par le cerf de Nara ne sera jamais transmis, où les gentils gauchistes de Narita n’arriveront pas plus que les autres à faire de leurs catacombes des cathédrales — mais où peut-être O Inari, l’honorable renard, qui a son temple entre beaucoup d’autres lieux au sommet du grand magasin Mitsukoshi, protégera la dame qui est venue le prier en faisant ses courses — où peut-être l’accordéoniste arrivera au bout de sa chanson italienne pendant la cérémonie du thé — où peut être la flèche arrivera au bout de sa course… mais là, ça n’a plus aucune importance. Tout est dans le geste du tireur. La flèche n’a pas plus de but que n’en a la vie : ce qui compte c’est la politesse envers l’arc. Telles sont les choses de mon pays, mon pays imaginé, mon pays que j’ai totalement inventé, totalement investi, mon pays qui me dépasse au point de n’être plus lui-même que dans ce dépaysement. Mon dépays.

就像古巴人会说的那样,Son cosas de mi país(这是我的国家的东西)。我想象中的国家,则被我用可以追溯到我童年时代的神话来填充,当我翻阅《飞侠哥顿》(Flash Gordon)时,里面的乌托邦(l’Utopie)对我来说是大而光鲜的城市群,有高耸入云的大道,那里的人有点像猫,又有点像亚洲人,总是来来往往。在我的国家,小猫一样的亚洲人,在笼子里的大象面前玩棒球,泉水滋润着地下城市,两旁是一圈圈或丰满或苗条的女士。循环播放的鸟鸣录音提醒我们,在往上七层楼的地方可能存在着鸟类。在我的国家,没有人会去解开纠缠在一起的自行车,公共作家永远不会收到阿兰·德龙的回信,奈良鹿委托的信息永远不会被递送,在成田机场抗议的温和左派也永远不会把他们的墓穴修建成大教堂,至少不会比其他人更成功——但也许御稻荷,这受人尊敬的狐狸(在三越百货公司顶层有祂的一座寺庙),会保护在购物时来向祂祈祷的女士——也许手风琴手将在茶艺表演时奏完他的意大利曲子——也许箭矢将射中它的目标(but)……但那时,这些已经不再重要了。一切都在射手的姿态中。箭矢和生命一样没有目的:最重要的是对弓的礼貌。这就是我的国家的事情,我想象中的国家,我完全发明了我的国家,完全投入到了我的国家,我的国家放逐我到异国(dépayse),以至于只有在这种放逐中我才成了我自己。我的异国(dépays)。

Chris Marker


注释

  1. 译者注:路路通即凡尔纳《80天环游地球》中的角色。
  2. 著名的词语saudade在葡萄牙语中是对于不存在或曾经存在的事物的一种模糊的和持续不断的愿望,对过去或未来都不一定存在的事物,但并不是对于现状的不满或强烈的痛苦悲伤,而更像是在懒散做白日梦。Saudade与nostalgia不同;nostalgia(这个词在葡萄牙语中也存在)这个词是痛苦与悲伤的混合体,快乐的回忆但不可能回到过去,只能单独存在于过去。Saudade像是nostalgia但又因有可能的归来富有希望,甚至即使归来希望渺茫或是在距离很远的未来、几乎对当现情况不会造成任何后果。一个人可以使用nostalgia来模拟一种对死去的爱人强烈的感觉,saudade则是一种对消失的爱人单纯的思念,即使这个人仅仅现在不在场。Nostalgia定位于过去并且有遵奉习俗的感觉,而saudade是个非常当现的,痛苦焦虑并扩展到未来的词。
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